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Interview accordée au génial Nico, webmaster du site « Polars Pourpres »
Rencontre avec Laurent Scalese, à Versailles. L'occasion de parler en toute sincérité de ses passions pour la littérature et le cinéma, et de son approche du roman policier.
Laurent, tu es depuis tout jeune passionné par la science-fiction, l’anticipation et les polars. Pourquoi aujourd’hui es-tu devenu un auteur de roman policier, et non de SF ?
Laurent, tu es depuis tout jeune passionné par la science-fiction, l’anticipation et les polars. Pourquoi aujourd’hui es-tu devenu un auteur de roman policier, et non de SF ?
J’ai toujours voulu raconter des histoires qui soient un mélange de réalité et de fiction. Quand j’ai commencé à écrire des nouvelles, la SF me permettait de m’évader totalement en créant des mondes qui n’existent pas. Mais je savais que ce n’était pas un genre commercial et que j’aurais moins de chances de me faire publier donc je me suis tourné vers le polar, qui m’apparaissait comme une alternative intéressante.
J’aimerais parler un peu de ton rapport avec le cinéma. Tu es notamment fan de réalisateurs comme Michael Mann ou David Fincher…
Pour moi, Michael Mann et David Fincher ont fait les deux plus grands polars de ces quinze dernières années. Fincher, avec son thriller Seven. Mann, avec Heat. Je ne crois qu’on ait fait mieux depuis dix ans. Ces deux films m’ont beaucoup marqué. C’est après avoir vu Heat que j’ai écrit mon troisième livre, Des pas sous la cendre, qui est une histoire de braqueurs. Et c’est après avoir vu Seven que j’ai fait L’Ombre de Janus : j’ai eu envie de raconter une histoire originale de tueur en série avec une chute surprenante, car la fin de Seven m’avait soufflé.
Et de quelle manière le cinéma t’influence dans ton style. N’y a-t-il pas quelque part un risque de vouloir coller à une vision très cinématographique des scènes, parfois difficile à retranscrire en littérature ?
Je pense que les gens de ma génération qui écrivent sont davantage influencés par le cinéma que par la littérature. On a donc des images dans la tête et dès qu’on veut les retranscrire, il y a forcément un découpage visuel qui s’opère. Mais c’est à l’auteur d’essayer d’habiller ces scènes avec son propre style, afin qu’il ne s’agisse pas uniquement de l’écriture d’un scénario. Mais le premier réflexe, effectivement, c’est de regarder un film et de se dire : « Ce film m’a plu, j’ai envie de faire quelque chose qui ressemble à ça ».Je crois vraiment que la plupart des auteurs de polars de mon âge te diront que ce sont les films qui nous ont le plus inspiré et le plus marqué. Quoique pour le Silence des Agneaux, j’ai préféré le livre au film et le roman m’a énormément influencé également.
De la trilogie de Thomas Harris, c’est celui que tu as préféré ?
Oh oui. Hannibal, c’est celui que j’ai le moins aimé. Dragon Rouge par contre est également brillant.
Tu avais aimé l’adaptation de Dragon Rouge par Michael Mann, sous le titre Manhunter / Sixième Sens ?
Très novatrice, sans doute arrivée trop tôt, beaucoup de gens n’étaient pas prêts à voir ce film. Et en fait, on se rend que Jonathan Demme qui a réalisé Le Silence des Agneaux s’est énormément inspiré du visuel amené par Michael Mann. Mann était sans doute trop en avance. C’était un film qui était très différent, et on sentait qu’il était en train d’ouvrir une porte sur un autre univers.
Pour en revenir à tes romans, peux-tu nous raconter un peu de quelle manière tu les construis ? Tu as déjà dit que tu n’avais pas forcément en commençant à écrire de canevas très précis avec un descriptif scène par scène, contrairement à beaucoup d’autres auteurs de polars…
Tout à fait, j’ai toujours une idée de départ, et la fin. Après, le but du jeu c’est d’arriver, à partir de ce point de départ, à rejoindre la chute. Et là, je me laisse porter par mon imagination, mes personnages… A partir du moment où j’ai bien cerné mon personnage principal, que je le connais bien, que je suis en phase avec lui, c’est lui qui me prend la main et qui m’emmène dans les dédales de l’histoire, et ça se fait naturellement.Evidemment, il y a des ratés. Des chapitres qui ne collent pas du tout, que je jette avant de recommencer jusqu’à ce que j’arrive à une forme aboutie, à ce que je veux vraiment faire.Je n’ai pas de plan : je n’aime pas travailler comme ça, parce que j’ai l’impression que c’est figé, que l’histoire est déjà prémâchée, et ça me frustre. Il n’y a plus cette excitation de l’inconnu. J’aime bien l’imprévisible, me dire « Qu’est-ce qu’il va lui arriver demain, à ce personnage ? ».
Un élément marquant dans tes romans, c’est ce souci de réalisme, notamment dans le domaine policier. Comment es-tu parvenu à approcher ce milieu ?
Le premier contact s’est passé comme ça : j’avais envoyé un courrier au ministère de l’intérieur, et l’assistante du directeur de la PJ de Versailles m’a appelé un jour en me disant que le directeur voulait bien me rencontrer. Je m’y suis donc rendu, et il m’a avoué n’avoir jamais eu d’entretien avec un auteur de polars alors qu’il est un grand consommateur de romans policiers. Il a répondu à mes questions dans un premier temps, on a sympathisé, on s’est revu et il m’a présenté d’autres policiers dans différentes brigades. Je les appelle parfois quand j’ai besoin d’informations sur un détail technique ou simplement pour demander de leurs nouvelles. Toutes les discussions que j’ai avec eux m’apportent quelque chose : ils me racontent leur vie, les enquêtes qu’ils mènent, et c’est toujours une source d’inspiration pour moi. Quelque soit la raison de notre rencontre, que ce soit pour boire un verre ou leur poser des questions, j’apprends toujours quelque chose qui me sert par la suite.
Autre élément qui apporte une touche de réalisme dans tes romans : la présence d’articles de journaux que tu insères dans tes chapitres. Alors, policier ou journaliste, ce sont des métiers que tu aurais aimé exercer ?
Alors, policier, non. J’en connais suffisamment pour savoir qu’ils ont une vie décalée et difficile. Journaliste, pourquoi pas… Mais non, je crois qu’écrivain ça me convient nettement mieux !
Dans tes romans, on retrouve souvent des personnages récurrents. Parfois des personnages qui sont héros d’une intrigue et qui réapparaissent en tant que personnages secondaires dans un autre livre. Est-ce parce que tu as du mal à te détacher de tes personnages, ou pour créer une complicité entre toi et le lecteur ?
Les deux. Créer une complicité avec ses lecteurs est toujours intéressant : les personnes qui ont aimé un de tes livres te demandent toujours s’ils vont retrouver tel ou tel personnage. Tu es donc forcément tenté de faire revenir ce personnage. Mais à la base, ce n’était pas du tout prémédité, je ne pensais pas faire ça. Il y a effectivement un personnage, Elie Sagane, qui est présent dans tous mes livres. Pas forcément dans le rôle principal, mais il revient dans chaque roman. C’est surtout un clin d’oeil au lecteur en fait. Et puis, moi-même, je le vois évoluer, avec moi. Je vois qu’il y a des choses que ce personnage pensait au début, et qu’il ne pense plus maintenant
Quels sont pour toi les ingrédients d’un bon polar ?
La base, c’est bien sûr le suspense ! Je me rends compte aussi que de plus en plus d’auteurs travaillent la psychologie. Les lecteurs cherchent des personnages attachants, qui ont une vie, comme nous tous : des gens à la fois ordinaires et extraordinaires. Ordinaires par leur vie de tous les jours, et extraordinaires car confrontés à des événements qui les dépassent. Le but du jeu, c’est de les amener à reprendre le contrôle, et à solutionner le problème.
Y’a-t-il un livre, policier ou non, que tu aurais aimé signer ?
J’aurais aimé écrire Je suis une légende, de Richard Matheson. C’est un livre d’anticipation, l’histoire du dernier homme sur terre confronté à une bande de mutants.Et certainement les livres de Raymond Chandler, Le Grand Sommeil notamment.En ce qui concerne les thrillers, Le Silence des Agneaux, de Thomas Harris, et pour la France, Les Rivières Pourpres, de Jean-Christophe Grangé.
C’est amusant, parce que Thomas Harris et Jean-Christophe Grangé ont chacun ouvert la voie au thriller sur leur continent.
Absolument. Je pense que Grangé a autant apporté chez nous que Harris aux Etats-Unis. Tout le monde le dit, c’est incontestable ! Tous les auteurs de ma génération ont lu Grangé, ont souvent été profondément marqués par les Rivières Pourpres et ont essayé de s’en approcher, il faut bien le reconnaître…
Merci Laurent pour cette interview !
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